J’aime bien les livres d’occasion. Ils ont déjà vécu une vie et parfois plusieurs.
Ils portent cette odeur bien caractéristique, mélange subtil de papier vieilli et de doux moisi. Leurs pages sont parfois écornées, tachées, et, pour les plus précieux, enrichies d’annotations, de passages soulignés ou de dédicaces.
Quand on les prend en main, leur peau raconte le vécu et l’expérience. Les caresser, les effleurer est un plaisir sensuel.
Ils recèlent aussi des instants d’intimité, laissés par les anciens propriétaires, par oubli ou par volonté, à l'attention de ceux qui les suivront. Comme cette petite carte datée d’août 2009, montrant à son recto la ville de Stein, sur les bords du Rhin en Suisse, accompagnée du Psaume 71,23, et au verso, un court texte manuscrit. Il relate à ma curiosité et pour mon grand plaisir, un moment particulier où à l’occasion d’un cinquantième anniversaire, ce livre fut offert.
Alors, ne jetez pas les livres. Cachez-y quelques secrets, une énigme. Soulignez ou stabilotez les passages les plus marquants et laissez-quelques notes manuscrites. Illustrez un chapitre d'un petit dessin… En un mot, traitez-les avec respect. Offrez-leur le bonheur de transmettre bien plus que ce que leur fonction première semble leur assigner.
Faites mine de les abandonner sur un rebord de table : ils ne resteront pas longtemps orphelins. Une main heureuse se chargera de les adopter, pour les accueillir, de quelques semaines à plusieurs années sur une table de chevet, ou bien au chaud dans une bibliothèque, jusqu’à ce qu’un autre prenne la relève.
Ne jetez pas les livres. C’est criminel !
(c) François Milhiet le 15 août 2025
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